Un monde sans polio posera de nouveaux défis

Publié le: 24 octobre 2018

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Des agents de santé qualifiés, Latif, Shahida et Abib, sillonnent le Pakistan en autobus et à pied. Munis d’une glacière contenant les vaccins antipoliomyélitiques destinés aux enfants, inlassablement, ils font du porte à porte pour s'assurer que chaque enfant est vacciné. Ils quadrillent les quartiers, maison par maison et, s’ils sont désormais bien accueillis, cela n’a pas toujours été le cas. Il fut un temps où les familles se méfiaient du vaccin et cachaient leurs enfants. Lorsque la campagne de vaccination a débuté  au Pakistan en 1995, il y avait des milliers de cas de poliomyélite. Aujourd'hui, il n'y en a plus que trois, mais comme le souligne Mohammed, agent de vaccination : "Nous ne devons pas baisser la garde, car de nouveaux cas pourraient réapparaître."

La polio en Afghanistan

La polio au Pakistan

En 1988, lorsque fut mise en place l’Initiative mondiale pour l’éradication de la poliomyélite ou IMEP, la polio paralysait pour la vie 10 enfants toutes les 15 minutes à travers le monde1. Grâce à l’IMEP, aux programmes de vaccination de routine, aux campagnes de rattrapage et à une surveillance sans faille, peu à peu des régions entières dans le monde ont été certifiées « exemptes de polio ». La région des Amériques fut la première en 1994, suivie du Pacifique occidental en 2000 et de l’Europe en 2002. En 2011, on célébrait le dernier cas de polio dans le sous-continent indien. Quant à l’Afrique, si le continent est certifié « exempt de polio » en 2016, il existe des cas de résurgences au Nigéria et plus récemment en République Démocratique du Congo avec un virus dérivé du vaccin oral.

Le vaccin antipoliomyélitique oral (OPV) contient un virus vaccinal affaibli qui se réplique dans l'intestin pendant une période limitée. Il est ensuite excrété. En de rares occasions, si une population est gravement sous-immunisée, un virus vaccinal excrété peut continuer à circuler. Dans de rares cas, le virus vaccinal peut muter en une forme paralysante - c'est ce que l'on appelle un poliovirus circulant dérivé du vaccin2.

On estime que, grâce à ces efforts, plus de 16 millions de personnes marchent aujourd’hui alors qu’elles auraient été paralysées à vie si elles n’avaient pas été vaccinées1.

L’effort ultime avant l’éradication

En 2018, il reste 3 pays d’endémie, où la poliomyélite n’a pas été jugulée : l’Afghanistan, le Nigéria et le Pakistan. La transmission endémique, qui se poursuit dans ces pays pourrait entraîner près de 200 000 nouveaux cas chaque année, dans les 10 ans à venir au niveau mondial3.  Il est donc impératif de ne pas baisser les bras ni de relâcher les efforts.

A la différence de la variole, la seule maladie humaine transmissible éradiquée à ce jour, la poliomyélite peut rester asymptomatique ce qui facilite la circulation silencieuse et la transmission de souches de virus dit « sauvage ». Des poliovirus dérivés du vaccin, en particulier le vaccin oral plus facile à administrer, peuvent également provoquer des résurgences de la maladie.

Pour pallier ces situations, en 2013 un nouveau plan de lutte a été présenté par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui vise à éliminer simultanément tous les types de poliomyélite, à la fois ceux provenant du poliovirus sauvage et de ceux dus aux poliovirus dérivés du vaccin. Ce plan a été élaboré en consultation avec les pays touchés par la poliomyélite, les parties prenantes, les donateurs, les partenaires et les organismes consultatifs nationaux et internationaux. Il prévoit l’association de 2 types de vaccins : l’IPV (Inactivated Polio Vaccine), le vaccin inactivé injectable et l’OPV bivalent (Oral Polio Vaccine pour les souches 1 et 3), le vaccin oral qui remplace le vaccin oral trivalent (souches 1,2 et 3)4.

« L’OPV a assuré seul un fantastique travail dans le cadre du Programme Mondial de l’Eradication de la Poliomyélite, mais ses limites intrinsèques et les insuffisances dans son utilisation sur le terrain  rendent l’atteinte d’un monde sans poliomyélite difficile sans une amélioration drastique de la situation économique de beaucoup de pays » précise Emmanuel  Vidor, AVP Global Medical Affairs chez Sanofi Pasteur. « Dans ce contexte, seul un déploiement global de l’IPV, lui aussi faisant face à des contraintes industrielles et opérationnelles, peut garantir un monde sans paralysies à poliovirus, avec cependant un rôle inévitable à jouer pour l’OPV actuel ou une version améliorée de celui-ci pour éliminer définitivement la circulation des poliovirus ».

La mise en place de ce nouveau calendrier vaccinal est coordonnée à l’échelle mondiale et se fait avec la collaboration active à un niveau international et local de tous les acteurs impliqués dans l’éradication : les gouvernements nationaux, l’OMS, le Rotary international, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des Etats-Unis, l’UNICEF, l’Alliance du Vaccin (GAVI), la Fondation Bill et Melinda Gates. Sanofi Pasteur est l’un des principaux fournisseurs de vaccins tant oral qu’injectable et il fournit la majeure partie des besoins pour ce dernier.

Préparer le monde sans polio

Nous sommes tout près d’un monde sans polio. Mais lorsque le dernier cas de paralysie lié au virus sauvage aura été recensé et que l’éradication de la polio sera officialisée6, en aura-t-on pour autant réellement fini avec la polio ? Rien n’est moins sûr. Il reste à anticiper les problèmes qui pourraient anéantir les efforts consentis depuis des décennies. Il faut dès aujourd’hui penser à demain.

L’un des principaux défis sera de continuer à mobiliser toutes les parties prenantes qui durant des années ont participé au programme d’éradication et de répondre au scepticisme potentiel quant à la nécessité de continuer la vaccination alors que la maladie ne sera plus officiellement présente. 

« Il conviendra d’organiser un écosystème avec une gouvernance au niveau global qui reprendra le flambeau de l’IMEP - dont la mission  s’arrêtera lorsque l’éradication sera certifiée -  et du financement  pour les pays les plus pauvres, très probablement via l’Alliance du Vaccin (GAVI), afin de pouvoir continuer à vacciner la population pédiatrique mondiale et maintenir à la fois des taux de couverture vaccinale élevés avec le vaccin polio inactivé visant à  éviter les résurgences et la surveillance des virus circulants » nous dit Corinne Bardone en charge des Affaires Publiques pour les vaccins polio chez Sanofi Pasteur. « Cet impératif va de soi aujourd’hui, mais qu’en sera-t-il quand la maladie aura été déclarée disparue ? C’est pourquoi il faut se préparer à la phase post-éradication dès maintenant pour garantir une fourniture de vaccin polio inactivé à la fois suffisante et pérenne même après l’atteinte de l’éradication ».

« Principal fournisseur des deux vaccins, le vaccin polio oral (OPV) et le vaccin polio inactivé injectable (IPV), Sanofi Pasteur est un partenaire de premier rang de l’IMEP depuis son lancement » déclare David Loew, Vice-Président Exécutif, Sanofi Pasteur. « L’entreprise a fourni plus de 6 milliards de doses d’OPV et des quantités importantes de doses de vaccins IPV à des prix abordables.  Son savoir-faire biotechnologique a permis de produire ces vaccins accessibles à l’échelle industrielle afin que chaque enfant, où qu’il naisse dans le monde, puisse en bénéficier. » 

Sanofi Pasteur est mobilisé pour que les questions posées par l’après éradication soient évoquées dès aujourd’hui. Le 22 octobre, ses équipes ont organisé un débat depuis le siège de Sanofi à Paris. Un panel d’experts, Mrs. Michel Zafran et Roland Sutter de l’OMS - respectivement Directeur du programme pour l’éradication de la polio et Coordonnateur de la Recherche – des représentants du Rotary et des acteurs de terrain au Pakistan, Afghanistan et Afrique ont discuté des obstacles à l’éradication et des défis post-éradication.

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Références

  1. http://www.who.int/en/news-room/feature-stories/detail/unsung-heroes-on-world-polio-day 
  2. http://www.who.int/features/qa/64/en/
  3. http://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/poliomyelitis 
  4. Pour éliminer tous les risques liés au type 2 et gagner en efficacité
  5. L’OPV a une efficacité limitée (15 à 20 doses sont parfois nécessaires pour assurer une protection vaccinale) et il peut potentiellement recréer des souches circulantes virulentes dans certaines conditions.
  6. Après une période de 3 ans sans nouveau cas de paralysie liée au virus polio sauvage.