La sclérose en plaques (SEP) est une maladie au cours de laquelle les cellules immunitaires s’attaquent au système nerveux central (SNC) – c’est-à-dire au cerveau et à la moelle épinière.
La SEP est une maladie neurodégénérative chronique au cours de laquelle le système immunitaire provoque des lésions dans le cerveau et la moelle épinière1,2. Elle est principalement causée par des lésions au niveau de la gaine de myéline : la couche qui protège et isole les parties longues et filamenteuses des cellules nerveuses ou axones. Les axones transmettent l’influx nerveux au cerveau et la gaine de myéline améliore sa conduction.
Les dommages causés à la gaine de myéline portent le nom de « démyélinisation ». La SEP peut également entraîner la section des axones et leur séparation du reste des nerfs3,4, ce qui altère la conduction dans certaines parties du cerveau.
Ces processus dégénératifs peuvent débuter très tôt au cours de la SEP, bien avant la manifestation des symptômes de la maladie5.
Les cellules immunitaires qui franchissent la barrière hémato-encéphalique provoquent une inflammation et détruisent le tissu cérébral
Les globules blancs et plus particulièrement les lymphocytes B et T contribuent à la SEP6,7,8, de manière à la fois indépendante et par le jeu d’interactions9,10,11. Les lymphocytes B qui produisent les anticorps, les lymphocytes T et d’autres cellules immunitaires peuvent franchir la barrière hémato-encéphalique et s’attaquer aux tissus dans le cerveau et la moelle épinière.
Les lymphocytes B libèrent également des substances du nom de cytokines qui déclenchent un processus inflammatoire, dans le SNC et à l’extérieur. Les chercheurs pensent que cette inflammation contribue à la SEP12.
Dans les formes les plus évoluées de SEP, les lymphocytes B activés13 et d’autres cellules immunitaires peuvent former des grappes dans les membranes du cerveau. Ce phénomène peut contribuer à l’évolution de la maladie.
L’activité immunitaire dans le SNC se traduit par la présence de lésions dans le cerveau. Les axones endommagés au niveau de ces lésions peuvent être remyélinisés, devenir inactifs sans être remyélinisés ou continuer de se dégénérer (ou de « s’atrophier »)14.
Les cellules immunitaires dans le cerveau réagissent aux lésions et provoquent d’autres dommages
Lorsque les tissus nerveux sont détruits, ils produisent des débris qui attirent l’attention des cellules immunitaires présentes dans le SNC, en particulier les microglies15.
Les microglies peuvent être bénéfiques : elles patrouillent le SNC à la recherche de plaques, de neurones endommagés et d’agents pathogènes qu’il faut éliminer. Dans la SEP, ce qui débute par une fonction protectrice se transforme en fonction destructrice16 : les débris de la démyélinisation ont pour effet de rendre les microglies hyperactives. Elles déclenchent une inflammation, contribuent à la destruction de la myéline, freinent la production de nouvelle myéline17,18 et causent des dommages aux axones.
La démyélinisation (en vert) produit des débris. Les microglies (en rose) – les cellules immunitaires qui patrouillent le système nerveux central – réagissent à ce phénomène
PERIPHERY = système nerveux périphérique
BLOOD-BRAIN BARRIER = barrière hémato-encéphalique
CENTRAL NERVOUS SYSTEM = système nerveux central
Activated microglia = microglie activée
Cellular debris = débris cellulaire
La plupart des traitements actuels ciblent les cellules à l’extérieur du cerveau
La barrière hémato-encéphalique protège le SNC et sélectionne rigoureusement les molécules qui peuvent la franchir. Les traitements actuels peuvent empêcher les lymphocytes T et B non désirés de pénétrer dans le cerveau. La plupart des traitements contre la SEP, comme par exemple les traitements à base d’anticorps, sont conçus pour cibler les cellules à l’extérieur du SNC, qui peuvent affecter une partie de l’activité dans le cerveau19.
Toutefois, plus nous comprenons la SEP et ses processus dans le cerveau, plus nous découvrons des cibles spécifiques dans le cerveau qui étaient jusqu’alors inaccessibles.
Les chercheurs étudient des molécules thérapeutiques qui peuvent franchir la barrière hémato-encéphalique
Le développement d’un traitement efficace qui puisse franchir la barrière hémato-encéphalique pour agir directement sur les cellules immunitaires du SNC est depuis longtemps un enjeu du développement de médicaments contre la SEP. La molécule thérapeutique doit posséder certaines propriétés chimiques qui lui permettent d’échapper au processus protecteur qui contribue à exclure les petites molécules et à les empêcher de pénétrer dans le cerveau.
Certains chercheurs développent de nouveaux médicaments potentiels contre la SEP qui peuvent franchir la barrière hémato-encéphalique et agir directement sur des cibles dans le SNC. L’une d’entre elles est la tyrosine kinase de Bruton (BTK)20, une enzyme présente dans certaines cellules immunitaires dont on a découvert récemment qu’elle jouait un rôle important dans l’activité immunitaire de part et d’autre de la barrière hémato-encéphalique21.
BTK est essentiel à l’activation des microglies22, des lymphocytes B et d’autres cellules immunitaires mises en cause dans la physiopathologie de la SEP. Un traitement pouvant agir sur la tyrosine kinase de Bruton dans le cerveau pourrait permettre de freiner l’activité des microglies et d’autres cellules immunitaires.
Les cellules immunitaires affectées par la tyrosine kinase de Bruton (BTK) de part et d’autre de la barrière hémato-encéphalique sont indiquées en couleur. La BTK est essentielle à la communication des microglies23, des lymphocytes B, des macrophages, des mastocytes, des microglies, des astrocytes24, des oligodendrocytes25 et de leurs précurseurs26, ainsi que d’autres cellules immunitaires mises en cause dans la physiopathologie de la sclérose en plaques
PERIPHERY = système nerveux périphérique
BLOOD-BRAIN BARRIER = barrière hémato-encéphalique
CENTRAL NERVOUS SYSTEM = système nerveux central
Lymphocytes (T et B) Macrophage Cellule dendritique Anticorps Mastocyte Microglie (activée) Astrocyte Oligodendrocyte (et précurseur) Cytokine Débris cellulaire
La prochaine étape chez Sanofi
Les chercheurs de Sanofi développent un inhibiteur de BTK qui selon toute hypothèse peut franchir la barrière hémato-encéphalique humaine. Ils partent du principe que si la substance parvient à pénétrer dans le cerveau, il devrait être possible de moduler les lymphocytes B et les microglies dans le cerveau.
C’est l’une des nombreuses approches du traitement de la SEP étudiées à l’heure actuelle par Sanofi.
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